John Atkinson Grimshaw Méditation
Petite définition :
L'époque victorienne c'est avant tout le règne de Victoria qui héritera d'un empire houleux en 1837 à l'âge de 18 ans et gouvernera jusqu'en 1901. L'Angleterre est en pleine révolution industrielle et ses villes se trouvent grossie par une déferlante de misérables. Les historiens situent le début de l'ère victorienne en 1832, lors du "reform act" (réforme électorale), cette loi méprisant les classes laborieuses attise la révolte et donne naissance au mouvement chartiste. La charte adoptée en 1838 réclame entre autre un suffrage universel masculin. Deux mondes s'opposent alors, le prolétariat et l'aristocratie, ce qui laisse présager une révolution sociale et culturelle.
Le terme "victorien" n'apparaîtra pourtant qu'en 1851, année de l"exposition universelle de Londres pour désigner le règne glorieux et béni de Victoria alors surnommée "la reine des fées".
A l'instar des "années folles" parisiennes ou de la conquête de l'ouest américain, le Londres victorien est la synthèse de ce siècle de la vapeur : entre salons bourgeois et misérables quartiers nappés de brouillard,un imaginaire est né.
"C'est l'époque des cabs (voiture) que l'on interpelle d'un lever de canne, des allumeurs de réverbères et des corsets, d'Oscar Wilde et de Darwin, des romantiques..."
"Sous la respectable surface de la société victorienne grouille un monde obscur et turbulent : la jungle urbaine des bas-fonds, univers sans égouts, sans police, sans frein, sans école." C'est là et ailleurs que je vous emmène, des ruelles ténébreuses de Whitechapel où sévit Jack l'éventreur, aux misérables trottoirs de l'East end arpentés par Oliver Twist nous ferons un petit détour vers l'invisible afin d'appercevoir les fées puis les vampires et découvrirons enfin la formidable émergence d'un Art qui me soulève l'âme.
William Turner, le parlement en feu
Whistler, Nocturnes
Le Londres de l'ère victorienne est la quintessence de cette époque, il brosse en effet la toile éclectique du genre humain.
L'architecture iconique londonnienne s'est bâtie sous Victoria et deviendra le théâtre de bien des histoires... La gare de Waterloo est ouverte en 1848, les docks "royal Victoria" apparaîtront en 1855, Big Ben sonnera la première fois en 1859, le quartier de Paddington surnommé la petite Venise se popularise vers 1860, et la station de métro "Baker street" est inaugurée en 1863...
La City élitiste fait le contrepoint avec les docks grouillants et les quartiers populaires.
Whitechapel est en 1840 le refuge des migrants pauvres des campagnes puis des irlandais et des juifs. Ses enclaves de Wapping, Aldgate, Bethnal Green, Mile End, Limehouse et Stepney forment ce que l'on dénomme aujourd'hui l'East End. Malgrès la série de meurtres qui eut lieu en 1888, Whitechapel Road n'était pas particulièrement sordide, c'est le dédale des petites ruelles qui s'y jetaient qui respiraient la crasse et le crime, Dorset street, Thrawl street, Berners street (rebaptisée Henriques street), Wentworth street et bien d'autres.
L'Abney park cimetery (métro Manor park) et le Hightgate cimetery (métro Arch way) font figure dans les "magnificent seven" les sept cimetières victoriens, là autour des sépultures courent des herbes folles...
Amateurs d'atmosphère, je vous invite à découvrir le Sherlock holmes museum de Baker street, il offre un décor victorien au visiteur qui s'imagine aisément dans la demeure d'un dandy du XIXème...
Les demeures bourgeoises construite au XIX ème dans le faubourg de Camden town sont morcelées en taudis où logent les irlandais qu'on a fait venir pour la construction des trois grandes gares King's cross, St Pancras et Euston. Camden town, aujourd'hui haut lieu des cultures alternatives, fait partie du district de Camden qui a fusionné plusieurs ditricts tels que Bloomsbury, Hampstead, "le poumon de Londres", ou Holborn ... allez vous y promener, Kellow Chesney nous dit que notre monde est si proche du XIXème que l'on pourrait s'y perdre...
The lady of Shalott waterhouse
Petite Histoire de l'Art :
L'Histoire de l'Art de l'époque offre une palette vermeille et éclectique répondant aux goût d'une population disparate. La vieille aristocratie et la bourgeoisie née de la révolution industrielle sont adeptes d'un art édifiant et classique fidèle à la Royal academy instaurée par Sir Joshua Reynolds. Un vent libertaire insuffle cependant un art nouveau aux peintres qui se distingueront par diverses "écoles" : les pré-raphaélites, Millais débattit un jour avec Hunt et Rosetti du tableau la transfiguration de Raphael :" Nous la condamnions pour son dédain grandiose de la simplicté et de la vérité, pour la pose pompeuse des apôtres et les attitudes du sauveur, contraires à une spiritualité vraie", les néo-classique proche des Olympiens plus orientalistes, sont les peintres de l'antique, les romantiques illustrateurs de l'antiquité celtique et du moyen-âge, les impressionnistes et post-impressionniste virtuoses paysagistes et portraitistes. La tendance "gothic revival" initié par les nazariens allemands exprime la volonté d'un retour aux valeurs spirituelles et chevalresques s'opposant à la société mercantile de l'industrialisation. On représente alors la femme en sirène ou en Circé, on use de figure littéraire comme l'Ophélia de Shakespeare ou la Lady of Shalott de Tennyson, on déssine l'invisible fée ou la terrifiante harpie...
John William Waterhouse 1849-1917 pré-raphaélite inspiré par les femmes, la mythologie, la nature, la poésie, les légendes,l'antiquité... un lien lui est consacré sur mon blog...
Dante Gabriel Rosetti 1828-1882 pré-raphaélite peintre et poète de génie...
John Everett Millais 1829/1896 pré-raphaélite virtuose
William Holman Hunt 1827/1910 pré-raphaélite antique délicieusement mystique ...
Richard Dadd 1817/1886 (préraphaélite, fondateur de la "Clique", groupe de dessin pré-réaliste) peintre onirique et fantastique des fées
John William Godward 1861/1922 olympien peintre vaporeux des femmes
John Atkinson Grimshaw 1836/1893 (paysagiste bucolique et taciturne et peintre féérique) un de mes favori, un lien lui est destiné sur mon blog...
Tissot James Jacques Joseph 1836/1902
Sir Lawrence Alma-Tadema 1836/1912 talentueux réaliste de l'antique
Benjamin Williams Leader 1831/1923 paysagiste atmosphérique...
William Powell Frith (1819-1909) co-fondateur du club “The Clique “
Walter Sickert 1860/1942 (post-impressionniste opposé au dogme victorien) peintre des nus des bas fonds de Camden town... (pour plus d'info un lien lui est consacré sur mon blog)
Collier, John 1850/1934 (entre préraphaélisme et olympien) sublime évocation féminine...
Draper, Herbert James 1863/1920 (très inspiré de mythologie grecque)
Albert Joseph Moore 1841/1893 (olympien)
Leighton Lord Frederick 1830/1886 (orientaliste, olympien, romantique)
Leighton Edmund Blair 1853/1922 (Romantique victorien)
John Singer Sargent 1856/1925 (réaliste néo classique) à mon sens proche des impressionistes
Ford Madox Brown 1821/1893 (préraphaélite neo classique)
William Maw Egley 1826/1916 (préraphaélite, néo classicisme)
James Abbott McNeill Whistler 1834/1903 (symboliste-impressionniste) le lien entre Paris et
Londres
John Anster Fitzgerald 1818/1906 peintre féérique victorien
Quelques somptueux musées londonniens gratuits où vous pourrez entre autres contempler ces oeuvres :
La Tate britain présente des oeuvres de Turner, Blake, Rosetti, Waterhouse ou l'Ophélie de Millais...
La Tate modern présente le cubisme, fauvisme, futurisme et art contemporain... ... ...
Le musée Sir John Soane's museum il s'agit de la maison d'un collectionneur fou, allez y !!!
Victoria and Albert museum, une collection disparate dans un bâtiment de pur style victorien
Pourquoi les créatures magiques ?
John Anster Fitzgerald Fairies looking throught a Gothic Arch
On comprend aisément que les romantiques européens qui font "prévaloir la sensibilité individuelle sur la raison et les création de l'imaginaire sur la représentation classique de la nature humaine" se nourrissent du folklore du "petit peuple" et trouve dans cet univers une inspiration logique. Tous les arts sont concernés, la musique avec Offenbach ou Beethoven, la littérature avec Shakespeare, Goethe ou Tennyson dont le monde du spectacle use pour créer et enfin la peinture qui utilisera la légende comme sujet de prédilection. "le songe d'une nuit d'été" de Shakespeare s'inscrit comme l'oeuvre recréatrice du "monde invisible", Victor Hugo le traduira...
La "fairy painting", proche du préraphaélisme est un mouvement artistique contestataire qui voit son apogée entre 1840 et 1870. Il exprime une forme de rejet des interdits moraux étouffants imposés par l'époque. Le regain de spiritualité et de pureté s'oppose au progré et à la science nouvelle (notons que Darwin établi sa théorie de l'évolution autour de 1837) et la représentation de la nudité choque le puritanisme de la respectable société victorienne. William Blake et Henry Fuseli créent des oeuvres avant 1800 qui annoncent le genre. Les peintres Richard Dadd, John Atkinson Grimshaw, John Anster Fitzgerald, et bien d'autres n'auront de cesse de représenter le "petit peuple" pour notre grand plaisir.
Le mouvement prends une telle ampleur qu'au début du XXème siècle apparaît "l'affaire des fées de Cottingley". Il s'agit de deux jeunes cousines de la campagne anglaise qui apparaissent sur des photographies accompagnées de fées. Conan Doyle écrira un jour au sujet de ces photos :
"Mon coeur s'est réjouit lorsqu'ici, en Australie, j'ai pris connaissance de votre note et de la publication des trois magnifique photos qui confirment les résultats que nous avons publiés. Quand la réalité de nos fées sera admise, les autres phénomènes psychiques trouveront une meilleur acceptation... Nous avons reçu des messages de façon continue, lors des séances pendant un certain temps, nous indiquant qu'un signe visible allait se manifester"
Imaginez, quelques instants un monde où le peuples et les intellectuels croieraient aux fées ... ... ...
Filmographie "victorienne" :
From Hell Quand l'Opium permet de résoudre des affaires réalisé par Albert Hugues
Sleey Hollow, la légende cu cavalier sans tête réalisé par Tim Burton
Sweeney Todd, le barbier diabolique de Fleet street, réalisé par Tim Burton
Alice au pays des merveilles, le joli conte réalisé par Tim Burton
Tess, les déboires d'une jeune et jolie paysanne, par Roman Polanski
Oliver Twist, l'histoire de Dickens porté à l'écran par Roman Polanski
Nicholas Nickelby, autre conte de Dickens réalisé par Douglas McGrath
David Copperfield, roman de Dickens réalisé par Simon Curtis
De grandes espérances, encore un Dickens réalisé par Alfonso Cuaron
Bright Star, l'histoire du poète John Keats réalisé par Jane Campion
Miss Potter, l'histoire de la conteuse porté à l'écran par Chris Noonan
Jane Eyre, le roman d'emily Brontê réalisé par Franco Zeffirelli
les Hauts de Hurlevent, roman d'Emily Bronte réalisé par Peter Kosminski
Raison et sentiments, le roman de Jane Austen réalisé par Ang lee
Orgueil et préjugés, un autre Jane Austen porté à l'écran par Joe Wright
Sherlock Holmes, l'histoire de l'enquetteur et de son ami Watson réalisé par Guy Ritchie
La vie privée de Sherlock Holmes réalisé par Billy Wilder
Le secret de la pyramide une enquête de Sherlock réalisé par barry Levinson
Le secret de Moonacre, conte enfantin réalisé par Gabor Csupo
Le prestige une histoire de prestidigitateur réalisé par Christopher Nolan
Docteur Jekyll et Mr Hyde, le Frankenstein des temps modernes réalisé par Victor Fleming
Angel, l'histoire d'une romancière par François Ozon
Dracula, le vampirisme vu par Francis Ford Coppola
Bibliographie non exhaustive:
Les bas-fonds de Londres kellow Chesney Texto, un précis d'histoire sur la pègre londonnienne sous Victoria, extremement bien documenté et lisible par les non historiens ...
Sarah Waters Caresser le velour, quand la passion embrase le coeur d'une jeune provinciale et la jette dans l'enfer du vice et de l'opprobre, Un grand roman. Du bout des doigts un excellent roman au renversement bouleversant. Affinités la noirceur des prisons de femmes, une médium et une demoiselle de la bonne société tissent la toile d ce briant roman...
Charles Dickens excelle dans l'art de raconter lépoque victorienne, il fleuri tant son récit de détail qu'on s'y croierait... Cette édition omnibus présente Oliver Twist, Nicolas Nickleby et un chant de Noel
Lire Edgar Allan Poe c'est lire le fantastique anglais, la version british de Théophile Gaultier, cette édition complète de bouquins présente entre autre le scarabée d'or, le cottage Landor, ses poêmes...
les aventures du jeune Bedlam de George Hagen relate l'histoire d'un jeune garçon balloté de tragédie en comédie en hommage à Dickens
La prolifique Anne Perry est l'Auteur du polar victorien, Half moon street, Resurrection row,...
Lee Jackson et ses secrets de Londres ou son jardin des derniers plaisirs illustre une fois de plus la noirceur victorienne avec des polars bien ficelés
Wilkie Collins auteurs contemporain et ami de Dickens auteurs de romans à suspense tels que la femme en blanc ou Melodramatic Amadale
"Elisabeth Goudge fut en plein XXème siècle un anachronisme vivant : une victorienne", la colline aux gentianes, l'arche dans la tempête, le pays du dauphin vert ...
Dans cette édition bouquins coici le premier tome des aventures de Sherlock Holmes par Conan Doyle quand le docteur Watson raconte Sherlock...
Linda Newberry De pierre et de cendre chez Phébus, un roman atmosphérique, magnifiquement gothique...
Sir James Matthew Barrie Peter pan, un classique oublié...
Lewis Caroll Alice au pays des merveilles
Paul Féval Les mystères de Londres
La mort bleueSheri Holman
Michael Cox la nuit de l'infamie, une confession
Oscar Wilde et le meurtre aux chandelles Brandreth Gyles
La rose pourpre et le lys Michel Faber
L'infortunée Wesley Stace
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